VOYAGES et BALADES

I. Froid Sibérien

photo de danielA 7 heures du matin, le jour commence à poindre le bout de son nez et un temps gris et triste nous accompagne dans la banlieue irkoutskienne. Des gouttes d'eau, lors d'averses violentes et courtes viennent s'écraser contre les fenêtres. Cela n'est pas très engageant mais avec un peu de chance, on espère une nouvelle éclaircie pour l'arrivée à la gare. Et en guise d'éclaircie, on a en fait droit à une pluie glaciale et continue qui nous transperce jusqu'au sang. On se précipite vers la sortie de la gare pour repérer le bus et se mettre à l'abri dedans. En guise de bus, on a droit à un mini-bus jaune très défraichi mais résolument moderne avec ses 2 écrans de télé, son lecteur de DVD piratés où les nombreux clips des stars russes sont enregistrés. Comme souvent, le russe semble assez abrupt au premier abord et encore une fois, le conducteur "Sergueï" semble très sérieux et fermé alors qu'au contraire, il se révèlera fort sympathique pendant toute notre visite dans la région. Le bus, crachotant une fumée noire, a quelques soubresauts mais finalement arrive à partir.

On sent qu'Alex est heureuse d'être là et avec la guide locale, elle présente "sa ville" avec une certaine émotion. On passe devant l'université où elle a étudié ou encore le jardin en face où elle a passé du temps avec ses amis. Puis on reprend le parcours normal de la visite, je vous le donne dans le mille, d'une église orthodoxe. Mais à côté, se trouvait un mémorial avec la flamme du soldat inconnu et une vue imprenable sur le port d'Irkoutsk où on sent qu'il y a eu beaucoup de problèmes vu le nombre de bateaux et autres bâtiments rouillés. A côté de l'église, une autre église mais catholique de style gothique qui fut édifié en 1881 par les nombreux polonais qui furent exilés à Irkoutsk à la fin du XIXème siècle avant la révolution bolchevique. Auparavant, au début du XIXème siècle, ce fut les décembristes qui furent envoyés loin de chez eux: les décembristes étaient des russes qui ont tenté un coup d'état en 1825 contre le tsar. La plupart de leurs femmes et enfants décidèrent de les rejoindre en Sibérie et développèrent de façon importante la vie culturelle et intellectuelle d'Irkoutsk qui fut un temps surnommée "le Paris de Sibérie". Ils furent graciés à la mort du tsar en 1855.

 

On file ensuite en périphérie de la ville admirer la statue du chef des décembristes à côté d'une église puis on passe devant quelques maisons traditionnelles en bois où habitaient ces fameux putschistes dont les plus connus sont les familles Troubetskoï et Volkonski. A qui appartenait la maison suivante? Je ne sais malheureusement plus; ces quartiers ont été fortement abimés par la modernisation russe car autant à droite de la route, on pouvait admirer cette magnifique maison autant à gauche, on pouvait constater l'insalubrité de certains logements russes.

A cause du temps, toute cette partie de la visite sera assez vite faite et lors du tour en bus dans le vieux Irkoutsk, comme nous étions en avance, Alex nous emmène vers le débarcadère du boulevard Gagarina. La pluie étant de moins en moins forte, on peut profiter de cette place et admirer la vue de l'autre côté de l'Angara où se trouve notamment la gare. C'est vraiment dommage que le temps soit bouché mais on imagine facilement la vue que l'on peut avoir par beau temps. 20 minutes plus tard, on retourne frigorifié au bus et Alex nous propose de passer un peu de temps au marché qu'on avait repéré dans la matinée. Plus qu'un marché, ce sont les halles d'Irkoutsk avec quelques stands qui débordent sur le parking à côté. Alex et la guide locale nous demande de bien faire attention car il y a maintenant de nombreux pickpockets qui ne s'embarassent pas de fioritures; à l'aide d'un couteau, il déchire le sac et ramasse ce qu'ils peuvent car la ville est devenue assez pauvre. On aura sans doute de la chance mais personne n'aura de problèmes pendant la bonne heure où l'on trainera dans le marché.

II. Le marché d'Irkoutsk

photo de loïcL'arrivée sur le marché se fait difficilement. Entre les voitures qui essayent de partir, celles qui essayent de se garer et celles qui ne veulent que passer, c'est un joyeux bordel! Enfin on est déposé et avec Oliv, on se répartit les tâches; pendant que je récupère un petit kilo de framboises, Olivier part à la recherche de caviar rouge. Les fruits des bois sont sur des stands situés à l'extérieur des halles. Je regarde 2-3 stands puis je me décide à acheter à un stand de 2 personnes. Après un "skol'ka?" un peu hésitant, la vendeuse me comprend et autant je comprends bien le "roubli" autant le chiffre annoncé est incompréhensible pour moi. Heureusement elle a avec elle un peu de papier et la transaction commence; annoncé à "120 roubli" finalement j'obtiendrai mon kilo de framboises fraîches pour "90 roubli" soit un peu moins de 3 €. On constatera pendant notre escapade marchande qu'il n'y a que très peu de russes qui achètent. Beaucoup n'ont pas les moyens d'avoir les produits proposés. Alors qu'autrefois c'était l'inverse; il n'y avait rien sur les étals mais ils pouvaient tout acheter.

Je rejoins Olivier qui n'a pas encore trouvé le caviar vu que les halles sont immenses et que surtout il a croisé à l'intérieur quelques autres et Alex qui nous propose d'aller au stand des bouriates.On la sent heureuse d'être là et elle est dans son élément. Les bouriates sont un peuple d'origine mongol principalement éleveurs et dans une moindre mesure cultivateurs. Une partie des halles leur est réservé pour vendre leurs produits artisanaux. Alex entame la conversation - je n'ai pas su si elles se connaissaient d'avant ou si c'était juste le fait qu'elles étaient du même peuple mais on avait l'impression que c'était de vieilles amies qui ne s'étaient pas vues depuis des années - et nous dit que si on veut goûter la crème fraiche issue des troupeaux de vaches, il suffit de tendre le poignet et on nous donnera une petite louche. En fait de petite louche, il faut imaginer une "patate" énorme de crème fraiche tenant en équilibre précaire venant s'écraser sur le dessus de ma main. Après avoir goûté, et peut être qu'en plus d'être bonne, le régime légumes et viande bouillis du transsibérien avait exacerbé notre sens du goût, un regard entre Olivier et moi a suffi pour nous décider. Et nous voilà en possession de 500 g au moins de crème fraîche qui iront très bien avec les framboises et le tout arrosé d'une pointe de vodka bien évidemment!

photo de loïcQuelques mètres plus loin, un autre stand bouriate vend du miel et rebelote, on tend spontanément le poignet mais là on nous propose de goûter avec un morceau de pain; ca se refuse pas [:o)) Des petites friandises rectangulaires au miel attisent les pupilles et les papilles et Olivier prendra en plus un pot de miel qu'il rapportera pour sa petite femme et surtout sa fille, la gourmande! Alex nous guide ensuite jusqu'au rayon caviar-poissons, situé à côté du rayon boucherie, où finalement le prix n'est pas si intéressant que cela; en effet, il y avait aussi du caviar, du vrai, du noir mais à près de 1500 roubles la petite boite (environ 50 €), alors que le caviar rouge n'est qu'à 150 roubles (environ 5 €), le choix est vite fait. Juste en face, une sorte de beignets fourrés aux herbes et autres épices avec un peu de viande semble fort appétissant. On en achètera un chacun puis en le mangeant directement, on en rachètera un autre juste après. Faut pas déconner, sur des trucs tellement bons, faut pas hésiter! On tourne encore un peu dans les halles à la recherche de la bonne idée sans oublier d'acheter au stand alcool, une petite bouteille...

Repus, il est temps de filer au restaurant pour le repas de midi; inutile de vous dire qu'on avait plus très faim! La partie dessert fut plus de la gourmandise que de la faim d'ailleurs. A partir de là, Alex nous dit au revoir pour le reste de la journée; étant chez elle, il était normal qu'elle en profite pour voir sa famille qu'elle n'avait pas vu depuis bien longtemps. C'est donc la guide locale qui nous emmènera à Litvianska au bord du Baïkal, dans l'après midi.

 


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